Déblocage des fonds pour les Ensa

Le déblocage des fonds pour les Ensa, Ecoles nationales supérieures d'architecture, a eu lieu le 21 avril dernier. Il fait suite aux mouvements de grèves des étudiants en architecture ayant commencés en début d'année.

En effet depuis février 2023, étudiants, enseignants et personnels administratifs ont manifesté et bloqué leurs établissements, à l'instar de l'ENSA de Rouen le 6 février dernier. Très vite, les 19 autres écoles d’architecture françaises se sont joints au mouvement. Le collectif "Ensa en lutte" avait été créé dans un même temps.
Pourtant le mouvement ne date pas d’hier ; En effet, dès l'année 2019 des revendications se font entendre au sujet du manque de budget alloué par l’État aux écoles d'architectures, mais elles sont interrompues par l’arrivée du Covid.

En cause

- Des bâtiments inadaptés, parfois même insalubres ou un manque d'ateliers
Par exemple, dans des écoles comme la Villette ou Grenoble, certains locaux sont très vétustes avec des trous dans le plancher et des fuites dans la toiture.
Un rapport de l’inspection générale des affaires culturelles datant de 2020 a révélé que l’État dépense en moyenne 8500 € par étudiant en école d’architecture, contre 10600 € pour ceux en université et 15000 € en prépa de grandes écoles. Des inégalités jugées inacceptables par les étudiants.

- La hausse du coût du matériel et des matériaux aux frais des étudiants
Le coût du matériel aux frais de l’étudiant est un problème majeur dans les études d'architecture. Malgré la volonté et les tentatives de faire bouger les choses, la situation s’est aggravée ces derniers mois avec l’augmentation globale des prix, due à l’inflation, et à la pénurie de matériaux comme le bois. Cf. article Pénurie de matériaux et conséquences

- La précarisation et le manque de personnel
Par exemple, la rémunération de personnes ayant 20 ans d’expérience n’évolue pas.
De plus, dans certains établissements il est parfois impossible de gérer la charge administrative faute de personnel. Pour rappel, la mobilisation a eu pour point de départ l’Ensa de Rouen. En effet, dans cette école des problèmes d’effectifs à la scolarité avaient contraint la direction à repousser la rentrée d’une semaine. Par la suite, les élèves avaient bloqués l’établissement. A l'origine une agente a géré seule l’organisation de tout un semestre, ce qui a eu pour conséquence un burnout.

Dans cette lutte, élèves et enseignants sont soudés. Ce mouvement a permis aux étudiants de faire remonter un certain nombre d’insatisfactions depuis de nombreuses années et de montrer qu'ils étaient capables de faire entendre leurs voix, étant les premiers confrontés aux problèmes dans les Ensa.
À travers les blocus et les occupations de bâtiments, étudiants et professeurs réclament donc l’aide du ministère de la Culture.

Déblocage de fonds

Cette mobilisation a payée puisque le 21 avril dernier le ministère de la Culture annonce débloquer des fonds.
En effet, après avoir rencontré les présidents des conseils d’administration, les directeurs des écoles d’architecture et les collectifs étudiants pour échanger sur la situation, la ministre de la Culture Rima Abdul Malak a annoncé une série de mesures d’urgence en faveur des écoles d’architecture.

Pour répondre aux difficultés des écoles d’arts et de design, son ministère avait déjà débloqué deux millions d’euros de crédits supplémentaires fin mars.
Les 20 0000 étudiants des Ensa bénéficieront eux d’une enveloppe de trois millions d’euros.

- Renforts administratifs
Le ministère de la Culture annonce la création de 25 postes supplémentaires sur l’année 2022-2023 pour les 20 Ensa, soit au moins un poste par école. Ces nouveaux moyens humains visent à répondre aux besoins urgents et permettre à tous d'exercer leur métier plus sereinement.

- Revalorisation salariale des enseignants
Les étudiants et les enseignants militaient également pour une revalorisation salariale mais aussi de leur statut.
Rima Abdul Malak rappelle « avoir augmenté la rémunération des enseignants contractuels au 1er janvier ». De plus, elle annonce « l’alignement des rémunérations des enseignants titulaires et des doctorants sur leurs homologues des universités, mettant fin à un écart salarial que beaucoup jugeaient injustifié ».

- Aide immédiate aux étudiants
Dans une lettre adressée aux étudiants en Ensa, la ministre a justifié le déblocage de cette aide qui sera consacrée "en particulier aux projets pédagogiques dont les coûts peuvent représenter un poids important et créer des inégalités entre étudiants".

- Plan d'action autour de la "culture de la charrette"
Le bien-être des étudiants a également été remis en avant avec une volonté d'approfondir les réflexions sur "leurs rythmes de travail" et de lutte contre les violences et le harcèlement sexiste et sexuel (VHSS). Rima Abdul Malak annonce : "J'ai décidé de rendre obligatoire la formation VHSS de tous les personnels, enseignants comme administratifs dès la rentrée 2023".
Les étudiants en architecture sont toujours confrontés à la "culture de la charrette" : une "pédagogie" qui implique un travail incessant, jusqu'à l'épuisement. Un enseignement déjà dénoncé depuis des années et qui était déjà sur la table du ministère de la Culture et de l'Enseignement supérieur avec un plan d'actions publié en mars 2022.

- Rénovation de certains bâtiments
Concernant la rénovation des locaux, Rima Abdul Malak rappelle qu'une "augmentation des moyens de 20% avaient été alloués à l'enseignement de l'architecture à la rentrée dernière, en plus des 57 millions d'euros du plan de relance investis dans la rénovation des écoles." Elle précise ensuite : "J'ai bien conscience que ces efforts n'ont pas encore répondus à l'ensemble des difficultés rencontrées".
Elle décide donc prioriser les dépenses afin de "résoudre les situations les plus urgentes comme à Grenoble où le toit est percé, créer une offre de restauration comme à Clermont-Ferrand ou trouver des solutions de relocalisation comme à Paris-La Villette."

- Importance de la transition écologique dans l’enseignement architectural
La transition écologique devait également trouver « une place centrale » dans le cursus architectural. Souhaitant aussi mettre cette thématique « au cœur des écoles », la ministre va organiser « une vaste concertation avec l’ensemble des communautés des Ensa en vue de relancer la stratégie nationale pour l’architecture » et de prendre davantage en compte les enjeux écologiques et environnementaux dans l'architecture.

- Fonds d'urgence pour les écoles d'arts
Toutes ces annonces font écho aux mesures prises pour les écoles publiques supérieures d'art.
"Le 28 mars dernier, la ministre de la Culture avait précisé une aide d'urgence de deux millions d'euros pour les 33 écoles territoriales publiques. Le manque de moyens humains et financiers et l'impression de ne pas pouvoir mener un enseignement de qualité pour les étudiants avait été largement dénoncé depuis l'automne dernier. Plusieurs écoles d'art sont toujours dans des situations critiques et menacent de fermer."

Ecoles d'art et d'architecture mènent ainsi le même combat ensemble, une technique qui semble porter ses fruits.

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